Ce voyage fut mouvementé. Partis par la route le 31 à 4 heures du matin, les convoyeurs prirent par étapes le chemin de Paris, avec un troupeau qui s'échelonnait sur 2 kilomètres. Les bêtes, harassées de fatigue, furent ravitaillées en chemin, selon les possibilités. Quelques-unes moururent. Enfin on put remettre le bétail à l'Intendance. Au retour, M. Pigeaux, pris par les allemands à Senlis, dut son salut à une chance inouïe autant qu'à son sang-froid.
Extrait de "Compiègne pendant la Guerre" de J.R. Lefèvre
Jacques Mermet écrit à ce propos dans ses articles du Progrès de l'Oise, "Il y a 5 ans , les Allemands à Compiègne":
"Le 30 août, le 13° territorial quittait Compiègne et embarquait à destination de Laval. L’officier de détail, M. Varcassel, vînt trouver M. da Seroux et lui dit:
- Nous avons environ 300 bœufs au champ de course. Nous vous les laissons. Vous en ferez ce que vous voudrez.
Un peu embarrassé du cadeau, M. de Seroux songea immédiatement aux moyens de soustraire ce troupeau à l’avidité des boches qui pouvaient arriver d’un moment à l’autre. Il fallait absolument diriger ces bœufs sur Paris.
M.de Seroux s’entretint de cette affaire avec M. Cassier et celui-ci découvrit l’homme dévoué qui se chargerait de la mission de conduire les bœufs à Paris. Cet homme était M. Pigeaux, frère du boucher compiégnois.
M. Pigeaux partit avec 280 ou 300 bœufs s’arrêtant, lorsque le repos était nécessaire aux bêtes. Celles-ci pâturaient en chemin.
On devine combien un tel voyage était lent, fatigant, périlleux. Les Allemands arrivaient rapidement et faillirent rattraper M. Pigeaux à Pontarmé.
Cependant malgré toutes les difficultés, M. Pigeaux put accomplir sa mission; il arriva à Paris et remit le troupeau à l’intendance. II ne manquait que six ou sept bœufs égarés en route.
M. Pigeaux voulut retrouver les animaux perdus. Il revint en automobile vers Compiègne, mais il fut arrêté par les Allemands à Senlis. On le garda pendant quelques jours puis il fut relâché.
Il avait ainsi sauvé un troupeau d’une valeur de 80 000 Fr. environ. Grâce à lui les propriétaires des animaux purent rentrer en possession de cette somme. "