Le nouveau pont de bois est terminé pour le mois de décembre. Sans être d'une élégance raffinée, sa ligne très simple, toute unie, ne dépare pas le paysage des coteaux voisins, verdoyants et modérés qu'a célébrés Sainte-Beuve. Il repose sur une forêt de pilotis d'une solidité à toute épreuve.
On l'a construit à proximité de l'ancien, en détournant légèrement l'entrée et la sortie. Il ne permet encore que le passage dans un seul sens, mais tel qu'il se comporte, il facilitera beaucoup les relations entre Compiègne et Margny.
Le général Klein est venu remplacer, aux bureaux de la Place, le général Lacotte. Plus heureux que son prédécesseur, il se maintiendra à son poste jusqu'au mois de juin 1915.
La campagne d'hiver se poursuit et voilà que nous atteignons la fin de l'année 1914 sans remarquer un seul événement capital. Les Hôpitaux, en plein rendement, augmentent encore leur nombre de lits ; l'autorité militaire fait réquisitionner par la Mairie le matériel de couchage qui est resté dans les maisons inhabitées.
Beaucoup de Compiégnois se sont installés provisoirement ailleurs, n'ayant aucune occupation qui les retienne dans leur ville. Les propriétés des Avenues sont fermées pour la plupart. Par contre des réfugiés s'entassent dans les locaux communaux. La garnison si glorieuse, est remplacée par d'anonymes troupes de passage. En un mot, la population a changé et Compiègne a perdu dès cette première année de guerre, son cachet d'antan.
M. Viviani, Président du Conseil, accompagné de M. Léon Bourgeois, vient y faire un court séjour, avant d'étudier sur place la situation des régions envahies et visite les tranchées du Puits d'Orléans, en forêt de Laigue.
1914 se termine. Déjà tant de deuils, tant de ruines !
La nouvelle année qui va commencer apportera-t-elle ce que l'on attend d'elle, c'est-à-dire la fin de la tourmente ?
Tout le monde l'espère et croit encore à une rapide conclusion.
J-Robert Lefèvre, extrait de "Compiègne pendant la Guerre (14-18) "
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